Le temps, le but et le chemin

Billet de juillet

Déjà l’été. Le climat ne nous le fait pas ressentir, et pourtant, l’année scolaire se termine. C’est un lieu commun de dire que le temps passe de plus en plus vite et qu’on y peut rien mais cela cache des questions réelles.

Lorsqu’il se confronte à notre expérience passée, le temps possède une valeur relative de plus en plus faible.
Comme dans une loi logarithmique, la valeur de ce que nous vivons serait à tempérer d’un facteur 1/x, x étant notre expérience accumulée.Puisque tout accélère, nous avons l’obsession de bien rentabiliser ce temps. La société nous vend en retour la culture du « tout, tout de suite ! » Est-ce vraiment satisfaisant ?

De l’autre côté, je n’ai rencontré qu’une personne qui sache ralentir le temps : le patron de la brasserie « Impératrice Eugénie » à Roubaix. Angoissé par les atteintes de l’âge, il a découvert une méthode d’une sagesse bien empirique : ne plus faire que … ce qui l’ennuie le plus, car alors, le temps se traine ! Détestant jardiner, il soigne ses plantes chaque soir et goûte ainsi le sentiment de vivre.

Il me semble que nous pouvons donner du sens à ce temps reçu (voire subi), même si ce n’est pas celui de l’accroissement perpétuel de nos capacités. Que souhaitons-nous en faire, dans ses deux dimensions : le but et le chemin.

– Pour le but, référons-nous à La Fontaine : « patience et longueur de temps font plus que force ni que rage ». Ou dit autrement, notre psychologie nous fait surestimer ce que nous pouvons faire en un an, et sous-estimer ce que nous pouvons faire en cinq. Que voudrions-nous avoir fait dans cinq ans ?

– Pour le chemin, conduisons-nous comme un pilote de rallye, ou comme dans une randonnée de découverte ? Parfois, certains s’échinent à accomplir leur volonté propre et à contraindre les événements. Comme le rappelle François Jullien, n’avons-nous pas à apprendre de l’approche chinoise pour nous couler dans le cours ininterrompu des choses, les laisser nous enseigner à bien aller vers notre fin ?

Et en définitive, le temps bien utilisé n’est-il pas celui qui me permet de rendre le service pour lequel je suis fait, et que je reconnais à la sérénité que je ressens dans les événements que je traverse ?